Togo: La cour de justice de la CEDEAO réhabilite les 9 députés

Article : Togo: La cour de justice de la CEDEAO réhabilite les 9 députés
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10 octobre 2011

Togo: La cour de justice de la CEDEAO réhabilite les 9 députés

photo Togocouleurs
Les 9 députés, proche de l’ANC, exclus de l’Assemblée nationale par le tandem RPT-UFC, viennent d’être réhabilité par la Cour de justice de la CEDEAO lors d’une assise tenue à Porto-Novo ce 07 octobre (Bénin) suite à un procès qui a opposé l’État togolais à ces députés.
Le verdict, sans aucune ambiguïté, stipule le retour des 9 députés à l’Assemblée nationale avec une indemnité de 3 millions F CFA par député.


• Rappel des faits

Tout commença avec l’élection présidentielle de mars 2010. Suite à cette élection contestée par Jean-Pierre Fabre, ex-dauphin de Gilchrist Olympio, ce dernier contre toute attente et contre la majorité de ses partisans, signa le 26 mai 2010, un accord dit historique avec le RPT, parti au pouvoir.
Cet accord fut le début d’une longue crise au sein de l’UFC, entre les partisans de Jean-Pierre Fabre et ceux de Gilchrist Olympio, qui conduisit à la création d’un nouveau parti politique ANC (Alliance Nationale pour le Changement), présidé par Fabre.

Mais cet éclatement de l’UFC n’est pas sans conséquence sur leur présence à l’Assemblé nationale. L’UFC comptait à l’époque 27 députés. A la création de l’ANC, 20 quittèrent la bannière de l’UFC pour rejoindre le nouveau parti.

La colère de Gilchrist Olympio et de ses fidèles ne s’est pas fait attendre. Pour punir les frondeurs, ils envoyèrent des lettres de démissions signées à blanc par 9 députés dans la logique d’éviter la transhumance politique.

Aidé par la lugubre machine RPT, sous le seau même de la Cour constitutionnelle, qui devrait protéger et faire respecter notre constitution, et sur demande du président de l’Assemblée nationale, Gilchrist savoura sa vilaine vengeance en voyant la radiation des 9 députés frondeurs de l’Assemblé nationale le 22 novembre 2010.

Mais c’est sans compter sur la détermination, le courage et la témérité des membres de l’ANC sous la conduite de l’homme de principe Jean-Pierre Fabre. Ils ont tenu bon; ils ont bataillé; ils sont allés jusqu’au bout. Ils ont fait recours à la Cour de Justice de la CEDEAO et celle-ci vient de leur donner raison; elle vient de rendre tout simplement la justice.


Photo: anctogo.com
• Une leçon pour tous les Togolais

Mais avant cette décision salutaire non pas à l’ANC mais à la République, combien le débat à propos de l’exclusion des 9 députés n’a-t-il pas fait objet de déraison, de sophisme, de cacologie, de contorsion intellectuelle. J’ai assisté ahuri à des débats où la reine raison s’est risiblement égarée dans les méandres de l’absurde et de l’illogisme.

Et tout récemment, dans une lettre ouverte adressée à Jean-Pierre Fabre, le blogueur Gerry Taama fit l’erreur candide de réduire le problème du Togolais aux manger, boire et se reproduire, considérant du coup qu’on devrait fermer les yeux sur les principes républicains pour remplir la panse du Togolais. Savez-vous le goût du miel dans un jardin où la liberté est bâillonnée? Il est acide! Et la liberté n’est-elle pas d’abord le respect des règles qui permettent à chaque sociétaire de manger son pain avec joie? Le pain ne peut véritablement avoir sa valeur de pain si on le mange dans la douleur. Il ne peut y avoir aussi de la joie qui vient de la liberté sans pain. La liberté et le pain sont comme les deux faces d’une même pièce.

C’est aussi une erreur de sa part que de considérer l’exigence de l’ANC de voir retourné ses députés, les députés de la nation à l’Assemblée nationale comme une simple question matérielle. Gerry Taama s’est même trompé de synonyme en considérant dans sa lettre les députés comme étant des notables. C’est à mon avis une faute comparable à ceux qui en manque de théorie ethnologique comparent les chefs d’États Africains à des Rois ou même la nation à une famille dont le chef de l’État en serait le chef. Un chef d’État n’est pas un Roi, ni un chef de famille. Il est sous contrat du peuple! Et les députés dans une République, ne sont pas des notables.

On ne peut donc en aucun cas comme le fait Gerry Taama, sacrifier le développement démocratique et économique à la compromission dans la violation des principes fondamentaux qui bâtissent la nation et la démocratie.
Car la question de l’exclusion des 9 députés est avant tout une question républicaine et pose aussi celle de la primauté de notre constitution: Que peut valoir des engagements internes d’un parti face à notre Constitution? Toute la question et tout le débat est en réalité là!

Le renvoi des députés élus sur mandat non-impératif, est une question majeure qui devrait fédérer toutes les forces républicaine pour que la République soit rétablie. Car en réalité, c’est de la République qu’il s’agit. Comment peut-on encore parler de République lorsque le pouvoir législatif, l’un des quatre pieds indispensable de la République est amputé? Comment peut-on parler de République lorsque mon suffrage peut-être annulé parce que la tête du député à qui j’ai porté ma voix ne plait plus à son chef de parti?

Et bizarrement, tout le monde, les partis politiques de l’opposition qui voyait pas de bon œil la montée en puissance du jeune parti ANC, les intellectuels y compris ceux de la diaspora qui sont souvent aveugles des réalités du terrain, des universitaires qui peinent à retrouver la droite raison,une société civile qui tourne en rond, voudrait que cette question soit mise de côté pour se tourner vers l’avenir. Et quel avenir? Pouvons-nous continuer par poser les pierres de la construction de notre avenir, si de toute évidence les fondations ne sont pas solides? Jésus nous a déjà averti: bâtissez sur du sable et vous verrez!(Matthieu 7, 25)

On ne peut donc au nom d’un dialogue – dialogue que personne ne refuse cependant pas– sapé les fondamentaux de notre République. Ce n’est pas du radicalisme; ça s’appelle le réalisme positif.

Aujourd’hui ce n’est pas le triomphe de l’ANC, mais le triomphe de la République togolaise.
Aujourd’hui c’est une victoire qui invite à l’espoir, car elle est le point lumineux qui brille au bout du tunnel, nous invitant à faire la traversée des ténèbres pour accueillir l’aurore.

La sentinelle, lui, nous l’a déjà dit: la nuit est longue mais le jour vient.

Nous devons aussi rendre hommage à la cour de justice de la CEDEAO qui a fait un travail éclairé. Cette Cour doit continuer et réussir par asseoir sa crédibilité dans une sous-région où les institutions internes souffrent de la main mise des politiques.

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Commentaires

David Kpelly
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Cette affaire! Je ne sais quoi dire la dessus pour le moment. Wait and see.Bon retour, mon grand ennemi.
Amitiés

Gerry
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Salut l'ami

Quand tu me cites dans un article, trouve le moyen de me tagger, c'est toujours bien.
Tu connais mon attachement au blogs, et le plaisir que j'ai à en faire la promotion. Donc, félicitation pour le blog.
Quant à nos différences de points de vue sur le sujet, là aussi, tu connais mon attachement au débat contradictoire. Bien ravi de trouver une autre expression par ici. Il en faut pour faire le Togo.
Bien à toi, et à très bientôt sur d'autres sujets.

Charles Lebon
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Salut Gerry,
J’apprécie ton ouverture. Le débat contradictoire n'est pas synonyme d'inimitié. J’apprécie ce que tu fais sur ton blog, pour que notre Togo, notre chère patrie se relève. Nos points de vues peuvent diverger ou converger. Et à mon avis cela n'est compris que des esprits en quêtes d'objectivité, des esprits autonomes, jaloux de leur indépendance intellectuelle.
Et comme tu le dis si bien, le débat contradictoire (j'ajoute par des conscience positive) "il en faut pour faire le Togo".

Bien de choses à toi!
Amitiés!